Ce n'est pas que j'y allais beaucoup sur ces plages lorsqu'enfant et adolescente mes parents me confiaient à Margot et à la Mam de Ty- Rous oàu à la Tante Louise de Lessirguy car il y avait toujours plus à faire que de faire la touriste : cueillir les haricots, les équeuter, ramener les vaches, récolter les oeufs, écossser les petits pois ou ramasser les pommes de terre , mais le dimanche on pouvait y aller quelques heures .
J'appelais les touristes "les tout risques" . Je croyais à 10 ans qu'on les appelait comme ça parce qu'ils osaient s'aventurer jusqu'à chez nous en automobile à leurs risques et périls !
Plus grande , alors qu'il me faisait rejoindre Pentrez ,je me suis souvent faite larguer sur cette plage la nuit à la sortie du bal qui se tenait à l'hôtel du roi Gradlon à Lestrevet ( un roi mythique d'Armorique, père de Dahut) si je n'acceptais pas de donner un baiser pour payer la traversée de ce désert salé ...Nous roulions sur le sable conscient que nous étions de fouler la ville d'Ys engloutie !
Au loin le Menez Hom d'où l'on ramenait des charrettes de foin .
Cette région était le berceau de ma famille maternelle mais je n'étais pas née là . J'aurais donné beaucoup pour l'être! Alors je me nourrissais de légende :
Lors d'une chasse, séparé de son entourage, le roi Gradlon se perdit dans la grande forêt du Ménez-Hom. Presque mort d'épuisement et de faim, il tombe par hasard sur l'ermitage de saint Corentin (maintenant Plomodiern). Saint Corentin possède un poisson merveilleux dont il coupe la moitié pour se sustenter chaque jour et qu'il retrouve entier chaque matin. Le saint, partageant quotidiennement son repas avec le roi, lui redonne la santé. En récompense de son hospitalité, Gradlon fit de saint Corentin le premier évêque de Cornouaille... et de Quimper.
Je me nourrissais encore plus de tendresse
Je me sentais libre la-bas . Pépère le mari de "Mam" ( la Tante MarieJan de ma mère ) m'emmenait au bistrot boire de la grenadine et il avait toujours des bonbons dans la poche
Mam me laissait boire de la crème entière à la sortie de l'écrémeuse et sa fille Margot - la future Maman de Marie L.- m'apprenait à faire des dessins sur le beurre
Un des deux fils Hervé était tuberculeux, il envoyait du sanatorium, de petits chevaux de cuir rouge qui m'évoquaient la Russie et les steppes . L'autre, Tin habitait Brest . Du coup on le pensait aisé !
Je pouvais grimper aux arbres, manger des pommes pas mûres , des poires, des figues même, aller acheter le pain , ramasser les mûres , chercher les premières noisettes, faire couler dans la bouche une giclée de lait chaud en direct des pis des vaches. Cuire les pommes de terre dans le gros chaudron. posé sur son trépied, ramasser du petit bois. Allumer sous la lessiveuse. Baratter. Jouer avec le chien . Fantasmer avec ma copine Annick de St Nic, qui vit à Saint Brieuc et que je vois toujours. Boire du lait ribot à volonté avant que l'on en donne au veaux. Apporter le son pour la pâtée des cochons. On en tuerait un à l'heure du battage quand les fermiers d'un même coin louerait la moissonneuse batteuse qui parfois appartenait à "un américain" - un breton émigré- Alors on irait de ferme en fermette faire ripaille de côtelettes , de saucisses et de boudin et enfouir nos mains jusqu'aux coudes dans l'e blé d'or de l'année
Un jour, à l'aube de ma seizième année, flirtant au bord d'une crique, sur un rocher avec un forain lorientais que je retrouvais d'été en été , je faillis noyer. Je ne m'en vantai pas en regagnant la ferme de St Nic à peine sauvée! Quand mon père, à Lanester, lut dans le journal le lendemain matin qu'une jeune morbihanaise avait mis en danger la vie d'un "sauveteur breton", père de 6 enfants, rien qu'aux initiales A.C il reconnut sa fille mineure et indisciplinée et dans les 3 heures après une bonne raclée, j'ai été ramenée à la maison et à la raison et mes belles vacances finistériennes ont été à jamais terminées. La vieille tante prétendait en avoir fait une attaque ! Je sais que le forain en question qui doit avoir 82 ans maintenant vendait il y a peu de temps encore des tapis sur le marché de Douarnenez car il a raconté cette histoire de la noyade manquée, il y a quelques années lors d'un diner auquel mon amie Annick assistait. Elle a pu 55 ans après lui dire qu'elle me connaissait et lui rappeler mon prénom .....Il espérait bien me revoir un dimanche au marché . mais bien que ce soit en France mon paradis favori , j'y vais trop peu. Surtout maintenant que Margot et son merveilleux René nous ont quittés.Que tous les cousins ou presque sont décédés
Et si je vous raconte ça aujourd'hui c'est que mon amie autrichienne Sonja y est avec Oli, pour 3 nuit de camping ,et qu'elle m'a envoyé ces magnifiques photos qui me replongent dans ces souvenirs d'antan, ravivant un amour du coin qui ne s'est jamais démenti. Et dans une certaine nostalgie.
Bruyères mauves et ajoncs d'or , la lande se donne ....dans toute sa splendeur . Fraicheur de l'air marin. senteur des pins . Comment ne pas s'abandonner aux songes de son coeur ? S'emplir de douceur ? Et que la Normandie me pardonne mais quand la mer au ciel la-bas se marie , même habillée de gris , quand on entend le pas léger des fées, qui viennent à la cérémonie , mais quel honneur , mais quel bonheur, d'être Bretonne ! .
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