mardi 9 août 2022

Un témoignage de Mahdi du Camino

 Aujourd'hui, 9 août, c'est la St Amour...

Il y a 21 ans, je marchais du Puy en Velay à Compostelle. J'avais tout quitté : mon travail (en CDI), mon appartement que j'ai vidé (j'ai tout donné, je ne voulais rien vendre, y compris ma moto et mes instruments de musique). Me reste ma voiture, ma caisse à outils, et une forte intuition que ma vie va changer si j'y vais à pied.
A Compostelle, je ne cesse de faire de petits cadeaux aux pèlerin(e)s rencontré(e)s au cours de ces 1600 premiers km de marche de ma vie. Arrive le moment où mon banquier Mosellan me fait comprendre que j'abuse de mon PEL (Plan Épargne Logement)... ma carte bancaire est avalée par un distributeur !
Par chance, j'ai acheté un billet de bus Compostelle-Toulouse. Nous sommes en 2001, dernière année en franc, il ne me reste que 2 francs 50. De quoi boire un café à la gare routière, où je sympathise avec Laurent et Laurence, deux amis partis ensemble.
On prend le bus pour Toulouse. Durant le trajet, ils me racontent leur Camino, moi le mien. On arrive à Toulouse à 4h du matin. Alors que je descends les escaliers pour sortir du bus, Laurent me dit "Un ami nous attend, tu devrais discuter avec lui..."
Je fais la connaissance de Richard... qui a monté un projet. "Une marche pour la paix". Ledit projet s'appelle "Marche ensemble". Symboliquement, j'insiste sur la symbolique car le projet était ouvert à toutes et à tous : un chrétien, un juif et un musulman cheminant ensemble, à pied, de Jérusalem à Compostelle... Woaw ! Moi qui viens de me faire 1600 km, je me disais "On peut aller partout, à pied, si on n'a pas de souci particulier...".
"Voilà le projet. Prends ton temps, réfléchis.", me dit Richard. Le lendemain, alors que je n'étais pas rentré chez moi en Moselle, je l'appelle : "Je ne sais pas comment je vais faire, mais je viens avec toi...".
Deux ans plus tard, on prend un vol depuis Bruxelles pour Tel-Aviv, avant de rejoindre Jérusalem, où on restera un mois et demi. Un jour, on prend nos billets d'avion, on se regarde, on compte jusqu'à 3... et on déchire nos billets.
On avait prévu de partir un an... on change nos plans et décidons de passer par les Balkans pour ce qu'ils avaient vécu.
Au terme de 22 mois de pérégrinations (on a pris notre temps car on intervenait dans les écoles pour échanger avec les jeunes sur le vivre-ensemble, la non-violence, l'idiotie de se taper dessus les uns les autres...) on est reçus par les prêtres de la cathédrale de Compostelle. C'est la St Amour, on ne l'a pas fait exprès. Ils sont quatre. Au bout d'une heure d'entretien, trois ont les larmes aux yeux. Ils nous demandent si on veut participer à la messe le lendemain... OK !
Le 10 août, on est au rendez-vous. La cathédrale est pleine à craquer ! Chacun d'entre nous fait une prière : en français, en hébreu et en arabe. J'ai beau être stressé, je vois des dizaines de personnes en larmes... impossible de savoir ce qu'il se passe...
Une aventure extraordinaire. Quand on nous demandait ce qu'on avait retenu, la réponse était toujous la même : ça rassure sur l'Humanité avec un grand "H". Il y a encore plein de gens biens sur cette Terre.
C'est toujours valable...





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