L’égalité entre amis induit la réciprocité, le respect, l’estime, et bannit toute domination et tout avilissement. L’amitié est une élection entre deux individus libres et égaux, elle exclut donc le rapport de force, le mépris, l’injure, l’abus de pouvoir. L’amitié demande du temps, de la présence, de la disponibilité de part et d’autre. Elle a toute la vie devant elle, elle sait que les amis se fréquenteront jusqu’au bout, converseront jusqu’au trépas. Elle donne la capacité de chérir l’autre même lorsqu’il est malade, vieillissant, diminué, parce qu’elle ne dépend pas de l’aspect physique et s’attache à ce qui en l’autre ne périt pas.
C’est la leçon de Socrate au bel Alcibiade : « Celui-là seul t’aime qui aime ton âme. »
Au fond, elle représente cet amour réciproque, sûr et durable dont chacun rêve, mais que, par paresse ou ignorance, personne ne met en œuvre.
Étant dépourvus d’amis véritables, beaucoup de contemporains se voient obligés, dans l’épreuve et l’affliction, de recourir aux psychologues, aux thérapeutes, ou encore l’arsenal des tranquillisants. On peut mesurer dès lors ce qu’on a perdu : l’amitié étant un lien d’égalité et de réciprocité, de plus entièrement gratuit, chacun est pour l’autre un soutien et un conseil, un guide, un repère et un abri en cas de tourmente.
Or, une des façons actuelles de dévoyer l’amitié consiste à utiliser l’ami comme un thérapeute ou un déversoir de ses problèmes, alors que la tradition philosophique et spirituelle concernant l’amitié précise que chacun porte le fardeau de l’autre, que chacun tour à tour encourage, soutient et console celui qui en a besoin.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire