Emmanuelle Bercot : «Le jour où j’ai fui Cannes pour recevoir mon prix»
En 1997, l’actrice réalisatrice recevait le prix du jury pour son second court-métrage Les Vacances. Ne se sentant pas capable de monter sur scène, elle prend alors un train pour esquiver la cérémonie... et le regrette aujourd’hui.
Elle fait partie des plus grandes réalisatrices du cinéma français, a tourné une vingtaine d’opus dont six longs-métrages, avec, entre autres, ses acteurs fétiches, Catherine Deneuve et Benoît Magimel. Elle a aussi gravi plusieurs fois les marches de Cannes, côté réalisatrice pour trois films, Clément (section Un certain regard en 2001) puis La tête Haute (2015) et De son vivant (2021), présentés hors compétition. Son travail d’actrice (elle a joué dans une trentaine de films) a, lui, été couronné en 2015. Cette année-là , Emmanuelle Bercot reçoit à Cannes, le prix d’interprétation pour son rôle de femme blessée par une passion destructrice dans Mon Roi réalisé par Maïwenn.
Cannes 1997
La tête haute ? Pas seulement. La réalisatrice nous confie sur ses premiers moments cannois une anecdote surprenante dont elle s’amuse aujourd’hui, tout en regrettant ce moment.
« C’était en 1997, lors du 50e festival de Cannes, raconte-t-elle au Madame Figaro. Nous étions logés avec mon équipe dans un lieu improbable très loin de la croisette. Cannes, c’était toute une aventure» explique celle dont le second court-métrage Les vacances a été sélectionné. « Je revois encore mon producteur appeler, d’une cabine téléphonique, l’un des organisateurs de la soirée de clôture pour savoir si on doit rester. Ce dernier nous dit oui ce qui signifie, sans l’expliciter vraiment, que je dois recevoir un prix. »
EMMANUELLE BERCOTL'idée de faire un discours devant ces noms si prestigieux m'a tétanisée
Elle poursuit : «Là je me dis : oh non, ce n’est pas possible». Et je suis prise de panique à l’idée de monter sur scène. À l’époque c’était le jury qui sélectionnait les récompenses pour les courts-métrages et ce dernier était composé de gens exceptionnels : « Parmi ces derniers, la présidente, Isabelle Adjani, les actrices Gong Li et Mira Sorvino, les écrivains Paul Auster et Michael Ondaatje, le metteur en scène Luc Bondy, le danseur Patrick Dupont, et trois réalisateurs à qui la réalisatrice voue une passion sans bornes, Tim Burton, Mike Leigh et Nani Moretti. »
« L’idée de faire un discours devant ces noms si prestigieux m’a tétanisée. Résultat, je cours à la gare pour prendre un train et rentrer à Paris. Je me souviendrai toujours de ce moment où j’ai ouvert la porte de mon appartement. Mon copain regardait la cérémonie retransmise en direct à la télévision et je vois alors un gros plan sur mon siège vide avec mon nom. Je venais de recevoir le prix du court-métrage! »
Monter sur scène, pas si simple
Un peu d’amertume ?
« Oui s’amuse-t-elle. J’avais déjà 29 ans en 1997, je n’étais pas une jeune fille mais je ne me sentais vraiment pas capable de faire face à la scène, je me suis consolée en me disant que j’avais eu le prix sans avoir à prononcer de discours. Aujourd’hui je regrette. Je me suis sans doute privée d’un moment unique, celui notamment de rencontrer toutes ces personnalités incroyables du jury que j’admirais tant ». En 2015, lorsqu’elle recevra son prix d’interprétation, la discrète actrice , montera cette fois-ci sur le podium et dira, émue et en larmes, à Maïwenn: « Ce prix, je veux dire à Maïween qu'il récompense son audace, son sens aigu de la liberté, son anticonformisme. Après Polisse, elle pouvait viser les plus hautes sphères, avoir les plus grandes actrices. Et non, elle a choisi une inconnue de 46 ans pour être son actrice", a-t-elle déclaré, avant d'ajouter : "Il n'y avait qu'elle pour oser ça, et Alain Attal pour la suivre. Maïwenn, tu as cru en moi comme personne avant, tu m'as regardée comme personne avant." Un discours émouvant qui déclenchera une salve d'applaudissements.
Emmanuelle Bercot est à l’affiche de L’Esprit Coubertin, de Jérémie Sein, en salle, et des Trois Fantastiques de Michaël Dichter, sortie le 15 mai.
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